Conseil d'État statuant au contentieux
9° et 8° sous sections réunies

Arrêt n° 151345
----------
COMMUNE DE VALLICA
----------
Monsieur BARDOU, rapporteur
----------
Monsieur LOLOUM, commissaire du gouvernement
----------
Lecture du 9 SEPTEMBRE 1996

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

Vu, enregistrée au secrétariat du Contentieux du Conseil d'État le 27 août 1993, l'ordonnance du 3 août 1993 par laquelle le président de la cour administrative d'appel de Lyon transmet au Conseil d'Etat, en application de l'article R 81 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la requête présentée devant cette cour par la COMMUNE DE VALLICA (Haute-Corse) ;

Vu la requête, enregistrée le 2 août 1993 au greffe de la cour administrative d'appel de Lyon, présentée par la COMMUNE DE VALLICA et tendant à l'annulation du jugement du 30 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Bastia, statuant sur renvoi du tribunal d'instance de l'Ile-Rousse, a déclaré illégales, à la demande de Monsieur X... et autres, les délibérations du 29 septembre 1977 et du 14 avril 1989 de son conseil municipal fixant le taux de la redevance d'assainissement ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :
- le rapport de M Bardou, Maître des Requêtes,
- les conclusions de M Loloum, Commissaire du gouvernement ;
 

Considérant qu'aux termes de l'article R 372-7 du code des communes, alors en vigueur : "Le conseil municipal ou l'assemblée délibérante de l'établissement public qui exploite ou concède le service d'assainissement institue la redevance d'assainissement et en fixe le tarif" ; qu'aux termes de l'article R 372-8 du même code : "La redevance d'assainissement est assise sur le volume d'eau prélevé par l'usager du service d'assainissement sur le réseau public de distribution ou sur toute autre source" ; que, selon l'article R 372-9 : "Lorsque l'usager est alimenté par un service public de distribution, la redevance correspondante est assise sur le nombre de mètres cubes d'eau réellement prélevé ou, le cas échéant, sur le forfait facturé" ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'il s'avère impossible de mesurer le volume d'eau réellement prélevé par les usagers, l'autorité compétente peut fixer le tarif de la redevance d'assainissement à partir d'une évaluation forfaitaire de l'importance des rejets d'eaux usées qui peuvent être attribués aux différentes catégories d'usagers du réseau d'assainissement ;

Considérant que, par une délibération du 29 septembre 1977, confirmée le 14 avril 1989, le conseil municipal de Vallica (Haute-Corse) a décidé d'instituer une redevance d'assainissement et en a fixé le tarif à 300 F pour "toutes les demeures ayant la possibilité de se raccorder au réseau eau potable et au réseau égout" ; que le montant de cette redevance a été maintenu à ce niveau par la délibération du 14 avril 1989, qui a, en outre, porté à un montant forfaitaire de 450 F la redevance due par chaque foyer en matière de consommation d'eau ; qu'il ressort des pièces du dossier que la COMMUNE DE VALLICA n'était pas en mesure, en l'absence de compteurs individuels, de connaître le volume des prélèvements réellement effectués par les usagers du réseau d'eau potable ; que, dans ces conditions, elle a pu, sans méconnaître les dispositions précitées des articles R 372-8 et R 372-9 du code des communes, déterminer de façon forfaitaire le tarif de la redevance d'assainissement due par les usagers du réseau d'égouts ; qu'elle est, dès lors, fondée à soutenir que c'est à tort que, pour déclarer illégales les délibérations précitées, le tribunal administratif de Bastia a estimé qu'elles avaient été prises en violation des dispositions des articles R 372-8 et R 372-9 ;

Considérant, toutefois, qu'il appartient au Conseil d'Etat saisi de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés devant le tribunal administratif de Bastia par Monsieur X... et autres ;

Considérant, d'une part, que ces derniers font valoir que le montant cumulé des redevances pour l'eau et pour l'assainissement auraient connu entre 1986 et 1989 une progression importante sans rapport avec un accroissement des services rendus aux usagers ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que cette augmentation est directement liée aux investissements réalisés par la commune en matière d'adduction d'eau et d'assainissement ; qu'ainsi, elle ne peut être regardée comme sans lien avec les services rendus ;

Considérant, d'autre part, que, dans les circonstances de l'espèce, la COMMUNE DE VALLICA n'a pas méconnu le principe d'égalité devant les charges publiques en prévoyant une seule catégorie d'usagers, sans distinguer, selon leur durée d'occupation, entre les différentes "demeures" de la commune ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE VALLICA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia, saisi, sur renvoi du tribunal d'instance de l'Ile-Rousse, d'un recours en appréciation de la légalité des délibérations du 29 septembre 1977 et du 14 avril 1989, a déclaré celles-ci illégales ;

 

DÉCIDE :

Article 1er: Le jugement du 30 avril 1993 du tribunal administratif de Bastia est annulé.

Article 2: La demande présentée par Monsieur X... et autres devant le tribunal administratif de Bastia tendant à ce que les délibérations du 29 septembre 1977 et du 14 avril 1989 du conseil municipal de Vallica soient déclarées illégales, est rejetée.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la COMMUNE DE VALLICA, à Monsieur X... et autres, au président du tribunal d'instance de l'Île Rousse et au ministre de l'économie et des finances.