TRIBUNAL ADMINISTRATIF de LYON 

N° 9304761 
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PRÉFET DE LA LOIRE 
c/ COMMUNE DE SORBIERS 
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Monsieur GUILLARD 
Rapporteur 
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Madame RICHER 
Commissaire du gouvernement 
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Séance du 19 octobre 1995 
Lecture du 9 novembre 1995

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE 

 

 

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS 

 

Le tribunal administratif de LYON 

(3° chambre)

 
 

J

Objet : 39-02-02-03 : Marchés et contrats administratifs - formation des contrats et marchés - appel de candidature

 

LE LITIGE

Le préfet de la Loire, a saisi le Tribunal administratif d'une requête, enregistrée au greffe le 24 décembre 1993, sous le n° 9304761 ;

Le préfet de la Loire demande au tribunal :
- d'annuler pour excès de pouvoir les délibérations du conseil municipal de SORBIERS du 19 octobre 1993, reçues en préfecture le 29 octobre 1993, approuvant les contrats d'affermage avec la société anonyme LA LYONNAISE DES EAUX-DUMEZ pour la gestion des services de l'eau et de l'assainissement et autorisant le maire à signer ces contrats ;
- d'autre part les contrats intervenus à cet effet ;

 

L'AUDIENCE

Les parties ont été régulièrement averties de l'audience publique qui a eu lieu le 19 octobre 1995 ;

Le Tribunal a entendu à l'audience publique :
- le rapport de Monsieur GUILLARD, conseiller
- les observations de Me SISINNO, substituant Me BONNARD, avocat de la commune de SORBIERS?
- les conclusions de Madame RICHER, commissaire du gouvernement,

 

LA DÉCISION

Après avoir examiné la requête, la décision attaquée, ainsi que les mémoires et les pièces produits par les parties avant la clôture de l'instruction, et vu les textes suivants :
- la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption,
- le décret n° 93-471 du 24 mars 1993,
- le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986,
- les articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et l'article 10 de la loi n° 77-1468 du 30 décembre 1977, complétés par l'article 44 de la loi de finances pour 1994,

 

LE TRIBUNAL

Sur la fin de non recevoir opposée au préfet de la Loire par la société LYONNAISE DES EAUX-DUMEZ :

Considérant que dans son mémoire enregistré le 18 août 1994, la société LYONNAISE DES EAUX-DUMEZ indique que le préfet de la Loire se prévaut de l'illégalité des arrêtés du 7 juillet 1993 par lesquels la collectivité publique a écarté la candidature des sociétés SAUR, CISE et RUAS, pour demander l'annulation des délibérations du 19 octobre 1993 aux termes desquelles la commune de SORBIERS a, d'une part, confié à la société LYONNAISE DES EAUX-DUMEZ la gestion déléguée par voie d'affermage, des services de l'eau et de l'assainissement et, d'autre part, autorisé le maire à signer les contrats ; que, dans ces conditions, la société LYONNAISE DES EAUX-DUMEZ n'est pas fondée à soutenir que la requête n'est pas motivée ;que le moyen doit être écarté ;

 

Sur le fond :

Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 : "Les délégations de service public des personnes morales de droit public sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'État. -L'autorité responsable de la personne publique délégante doit satisfaire à l'exigence de publicité par une insertion dans une publication habilitée à recevoir des annonces légales et dans une publication spécialisée correspondant au secteur économique concerné ; cette insertion précise la date limite de présentation des offres de candidature, qui doit être fixée un mois au moins après la date de la dernière publication ; elle précise également les modalités de présentation de ces offres et mentionne les caractéristiques essentielles de la convention envisagée, notamment son objet et sa nature. La collectivité publique dresse la liste de candidats admis à présenter une offre après examen de leurs garanties professionnelles et financières et de leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant le service public."

Considérant que par décisions du 7 juillet 1993, la commune de SORBIERS, en application des dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique, a arrêté la liste des entreprises admises à présenter une offre pour obtenir le contrat de délégation pour la gestion des services des eaux et de l'assainissement pour la commune de SORBIERS ; que le préfet est fondé à exciper de l'illégalité des délibérations du 7 juillet 1993 pour demander, d'une part, l'annulation des délibérations du 19 octobre 1993 autorisant le maire à signer les contrats et, d'autre part, l'annulation desdits contrats ;

Considérant que le préfet fait valoir que les candidatures des sociétés SAUR et CISE ont été écartées par les délibérations du 7 juillet 1993 en violation des dispositions de l'article 38 de la loi du 29 janvier 1993 précitée ; qu'il résulte de cet article que les délégations de service public à des personnes morales de droit privé sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité de manière à permettre la présentation de plusieurs offres concurrentes ; qu'à cet effet, la collectivité publique arrête la liste des candidats admis à présenter une offre devant la commission d'appel d'offres au vu des seuls critères prévus par l'article 38, à savoir leurs garanties professionnelles et financières ainsi que leur aptitude à assurer la continuité du service public et l'égalité des usagers devant ledit service public ; qu'il ressort de l'instruction que la commission d'appel des candidatures a décidé de prendre en compte les résultats obtenus par les entreprises à l'occasion d'opérations de recherche et de réparation de fuites d'eau effectuées sur la commune, et a, par ailleurs, estimé que le candidat devait pour être retenu, avoir une implantation locale dans au moins cinq communes de plus de 10 000 habitants ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la candidature de la société SAUR a été écartée au motif qu'elle ne disposait que d'une référence d'une commune de plus de 10 000 habitants dans un secteur proche de la commune de SORBIERS ; qu'un tel motif, qui a pour effet de restreindre géographiquement la présentation des offres concurrentes, méconnaît les dispositions de l'article 38 susvisé ; qu'ainsi, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, le préfet de la Loire est fondé à solliciter l'annulation des délibérations du 19 octobre 1993 et des contrats d'affermage pour la gestion des services des eaux et de l'assainissement de la commune de SORBIERS ;

 

DÉCIDE

Art 1 : les délibérations prises par le conseil municipal le 19 octobre 1993 ainsi que les contrats d'affermage pour la gestion des services de l'eau et de l'assainissement sont annulés

Art 2 : le présent jugement sera notifié conformément aux dispositions de l'article R 211 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel

 

Délibéré à l'issue de l'audience du dix neuf octobre mil neuf cent quatre vingt quinze, où siégeaient :
Monsieur FONTANELLE, président,
Monsieur GUILLARD et Madame VERLEY-CHEYNEL, conseillers,
assistés de Mlle MAURIN, greffier ;

Prononcé en audience publique le neuf novembre mil neuf cent quatre vingt quinze 

La République mande et ordonne au préfet de la Loire, en ce qui le concerne, et à tous huissiers à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.